10 septembre 2024 / Par Current Affairs
Le Canada a besoin d’une réglementation sur l’électricité qui fonctionne dans le monde réel
Le Canada a besoin d’une réglementation sur l’électricité qui fonctionne dans le monde réel
Le projet de Règlement sur l’électricité propre (le Règlement) a été publié en août 2023. Depuis, Électricité Canada et ses membres n’ont cessé d’intervenir auprès du gouvernement fédéral au sujet du règlement proposé, de sa modélisation et de ses répercussions possibles sur le secteur de l’électricité et sur l’économie en général.
Fin août, le président-directeur général d’Électricité Canada, Francis Bradley, a été interviewé par le Globe and Mail au sujet des inquiétudes majeures de l’industrie sur l’application de la réglementation dans certaines régions. Nous avons également publicisé nos préoccupations et lancé une campagne publicitaire en ligne pour sensibiliser la population aux éventuels problèmes de fiabilité et d’abordabilité que pourrait entraîner une réglementation finale irréalisable. Affaires courantes s’est entretenu avec Michael Powell, vice-président des relations gouvernementales d’Électricité Canada, au sujet de l’importance de viser juste avec ce nouveau règlement.
Bonjour Mike, merci d’être des nôtres. Pourquoi le Règlement sur l’électricité propre est-il important, non seulement pour le secteur de l’électricité, mais aussi pour les Canadiens en général?
Le Règlement sur l’électricité propre limitera la quantité d’électricité pouvant être produite à partir de sources émettrices en 2035 et au-delà. Aujourd’hui, le réseau électrique canadien est composé à plus de 84 % de sources non émettrices; nous partons donc d’un bon pied. Mais les 16 % restants seront les plus difficiles à réduire, surtout si nous nous efforçons de doubler, voire de tripler la taille du réseau d’ici 2050.
C’est dans certaines provinces que ce règlement aurait le plus d’impact : Nouvelle-Écosse, Nouveau-Brunswick, Ontario, Alberta et Saskatchewan. Les sources de production émettrices continuent de jouer un rôle clé dans la fourniture d’électricité de base dans ces provinces. C’est pourquoi il est vraiment important de bien définir le règlement. Il sera essentiel de prévoir la flexibilité voulue pour garantir le maintien de la fiabilité et de l’abordabilité au-delà de 2035.
Il est également important que le Règlement sur l’électricité propre soit bien conçu, car notre capacité d’électrifier avec succès l’économie canadienne et de réduire les émissions globales en dépendra. Bien que le secteur de l’électricité ne représente que 47 Mt d’émissions de carbone, le Conseil consultatif canadien de l’électricité a souligné que nous avons le potentiel de réduire de 268 Mt les émissions de carbone provenant d’autres secteurs d’ici 2050. Cela ne sera possible que si l’électricité reste abordable et fiable.
Quels sont, selon vous, les plus grands problèmes à résoudre en ce qui concerne le Règlement et le secteur de l’électricité?
Nous craignons que le gouvernement, lorsqu’il fixera ce règlement, soit trop strict. Il serait alors difficile, voire impossible, pour les exploitants de réseaux de maintenir la fiabilité du système pour les Canadiens.
Chaque province et territoire du Canada part d’un point différent en ce qui concerne la décarbonation du système. Certaines provinces auront une plus grande marge de manœuvre simplement en raison des ressources naturelles dont elles disposent. À l’heure actuelle, nous craignons que si la réglementation finale n’est pas suffisamment souple, des pannes d’électricité et des baisses de tension risquent de se produire à ces endroits.
Les publicités en ligne lancées par Électricité Canada le 23 août affirment que le Règlement sur l’électricité propre entraînera des problèmes de fiabilité et d’abordabilité. Comment cela se produira-t-il?
Tout d’abord, il est important de rappeler que le Règlement n’a pas encore été finalisé. Nous menons une campagne pour nous assurer que le public canadien et les décideurs fédéraux sont conscients des risques qu’ils courent si le Règlement n’atteint pas la cible.
Atteindre la cible signifie que les exploitants de réseaux indépendants et les services publics de toutes les provinces peuvent envisager comment respecter le règlement. Ils sont les experts qui construisent le système et fournissent de l’électricité tous les jours de l’année. Leur voix est essentielle.
Nous travaillons tous à bâtir un réseau électrique plus propre. D’importants travaux sont en cours dans tout le Canada : projets nucléaires, remise en état et ajout d’hydroélectricité, croissance des énergies éolienne et solaire, ajout de batteries. Ces travaux sont passionnants et importants pour notre avenir énergétique. Toutefois, nous devons être attentifs à ce qui est faisable dans ces délais serrés tout en veillant à ce que tous les Canadiens aient de l’électricité. Nous connaissons un taux de croissance de la demande d’électricité le plus élevé depuis deux générations. Ce sont des problèmes importants qui méritent qu’on s’y arrête et qui nécessitent un équilibre.
Si nous voulons réussir, nous devons vraiment nous assurer que nous avons des outils disponibles, répartissables, flexibles et abordables. Tout en construisant l’avenir et en investissant dans les technologies propres échelonnables, nous devons comprendre qu’il faudra du temps pour arriver au but. Sur la voie vers cet avenir, nous devrons nous assurer que tous les foyers canadiens continuent à recevoir de l’électricité.
Dans sa version actuelle, le Règlement ne permettra peut-être pas aux provinces qui ont les plus grands défis à relever d’assurer un service fiable pour tous.
Quelles étapes devons-nous franchir maintenant pour que le Règlement fonctionne?
Le gouvernement du Canada prendra une décision dans les prochains mois sur la forme que prendra le Règlement définitif. Dans l’intervalle, notre secteur restera propre et le deviendra de plus en plus.
Ce que nous voulons voir, c’est un Règlement final qui soit suffisamment flexible pour qu’un exploitant de système n’importe où au pays puisse savoir quelle voie emprunter sans compromettre la fiabilité ni l’abordabilité. Le Règlement doit fonctionner avec les outils et les technologies dont nous disposons aujourd’hui, et il doit le faire d’une manière raisonnable pour les clients. Nous continuerons à intervenir et à apporter notre point de vue. L’enjeu est trop grand pour laisser place à l’erreur.