2 octobre 2023 / Par Current Affairs

La distribution d’électricité au Canada

Les 20 et 21 septembre dernier, le Conseil de la distribution d’Électricité Canada a tenu à Calgary, en Alberta, sa réunion annuelle en personne. Ce conseil concentre ses efforts sur les enjeux qui entourent l’acheminement de l’électricité, à une tension sécuritaire, directement aux ménages et aux entreprises. Comme les sociétés de distribution interviennent à la dernière étape qui précède la consommation, ce sont elles qui doivent mettre en place et maintenir l’alimentation en électricité.

Pour en savoir davantage à ce sujet, Affaires courantes a discuté avec Alex Kent, directeur de la distribution et des affaires réglementaires à Électricité Canada.

Bonjour Alex et merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Pourriez-vous nous dire quelques mots sur les activités menées par les sociétés de distribution d’électricité et sur l’importance de leur rôle dans l’optique de notre avenir carboneutre?

Les sociétés de distribution possèdent et exploitent les lignes électriques qui alimentent votre ménage ou votre entreprise. C’est pourquoi, dans le secteur, nous les appelons « fournisseurs du dernier kilomètre ».

Les lignes de transport font parvenir l’électricité des installations de production aux postes électriques du réseau de transport, puis le réseau de distribution l’achemine de ces postes aux consommateurs. Le rôle particulier que jouent les sociétés de distribution dans la préparation de l’avenir carboneutre tient au fait qu’elles fournissent de l’électricité produite sans émissions ou à émissions nulles et permettent ainsi à d’autres secteurs industriels ou à l’industrie en général de se décarboner en remplaçant par l’électricité leurs sources d’énergie à teneur élevée en carbone. On peut donc dire qu’un véhicule électrique est alimenté au moyen d’électricité fournie par le réseau de distribution.

Quelle incidence l’adoption des véhicules électriques aura-t-elle sur le réseau et les consommateurs?

Tout simplement, il faudra injecter davantage d’électricité sur l’ensemble du réseau de distribution pour compenser l’essence et le diesel que consommait auparavant le secteur des transports.

Par ailleurs, chaque véhicule électrique est une batterie géante qui peut consommer, stocker et fournir de l’énergie. En principe, si un véhicule électrique était branché chez moi lorsqu’un blizzard provoque une panne de courant, il pourrait alimenter ma maison, de sorte que je ne manquerais jamais d’électricité. On voit là une possibilité au chapitre de la fiabilité en situation d’urgence.

Il y a également une possibilité pour l’écrêtement des pointes. Pendant la journée, la demande d’électricité est faible, car les gens sont au travail ou en classe et ils n’utilisent pas d’électroménagers énergivores. La demande augmente vers 17 h lorsqu’ils rentrent chez eux et font fonctionner leur four, leur cuisinière et leur micro-ondes. Ce ne serait pas le bon moment pour que tous les voisins du quartier rechargent leur véhicule électrique.

Des membres d’Électricité Canada sont en voie de déployer un nouveau tarif d’électricité de nuit très bas, si ce n’est pas déjà fait. Ainsi, les propriétaires branchent leur véhicule électrique en rentrant du travail, mais la recharge ne débute pas avant minuit, quand la majorité des clients ont éteint les autres appareils pour la nuit. Cette façon de procéder, qui empêche de surcharger le réseau d’électricité, présente un avantage important pour les clients, car elle réduit leur facture d’électricité.

Au cours de la dernière année, nous avons produit deux rapports (Back to Bonbright et Build Things Faster) qui donnent des indications concernant la réglementation et les projets d’aménagement. Quelles sont les principales mesures que doivent prendre le gouvernement et les organismes de réglementation, alors même que nous redoublons d’efforts pour renforcer la capacité du réseau?

La grande conclusion qui ressort de Back to Bonbright, c’est que les organismes de réglementation, d’une manière ou d’une autre, appliquent les principes de Bonbright pour réglementer l’économie. En gros, ces principes constituent les règles qui nous permettent de tenir compte de l’intérêt du public lorsque nous étudions une proposition présentée par une compagnie d’électricité. Nous avons découvert que, même dans le contexte de la décarbonation, où nous n’avons pas le choix de passer à l’action, ces règles fondamentales continuent de s’appliquer

La décarbonation, qui a été amorcée sous l’impulsion du gouvernement fédéral, a des répercussions sur le coût pour la clientèle. C’est pourquoi ce gouvernement devrait appuyer d’une manière ou d’une autre la transition des compagnies d’électricité vers la carboneutralité et les organisations qui investissent dans ce type de projets.

Dans notre rapport intitulé Build Things Faster, nous nous sommes demandé comment nous pourrions « bâtir plus rapidement » parce que, d’après l’expérience de nos membres, il faut compter de cinq à dix ans pour faire approuver un projet au Canada. Par exemple, si l’on doit attendre huit ans pour faire approuver un projet puis consacrer de trois à quatre ans à la construction des lignes de transport, ça fait douze ans en tout. Nous ne pourrions donc pas respecter l’objectif de carboneutralité du réseau d’ici 2035 prévu par la loi. Même en injectant plus d’argent pour régler le problème, ça ne nous ajouterait pas plus de temps.

Quel est le plus gros problème à venir pour le réseau de distribution?

Dans le passé, on pouvait très bien prévoir la charge nécessaire pour alimenter les utilisateurs du réseau de distribution, car les choses changeaient très peu. Du fait que nous remplaçons actuellement des sources d’énergie par d’autres, le contexte évolue très rapidement et dans des directions inattendues. Qui achètera un véhicule électrique? Est-ce que cette transition se fera de façon uniforme dans tous les quartiers d’une ville?

Maintenant, tout indique que quelques groupes socioéconomiques seront les premiers à se procurer des véhicules électriques et que ces groupes pourraient être concentrés, ou non, dans certaines portions du réseau de distribution. Il faudrait alors probablement mettre à niveau les portions du réseau en question pour répondre à cette demande accrue. Nous ne savons pas ce qui est en train de se produire ni quand les choses arriveront. Nous pouvons simplement nous fier aux meilleures hypothèses en espérant que l’organisme de réglementation approuvera les travaux qui sont nécessaires.

Quelles seront les grandes priorités du Conseil de la distribution en 2024?

Depuis quelque temps, nous discutons principalement de l’incidence des véhicules électriques sur le réseau, de l’innovation en matière de réglementation et de ce que l’on entend par des « activités centrées sur la clientèle ». La résilience du réseau est un autre sujet important. En plus de continuer à se multiplier, les phénomènes météorologiques extrêmes gagneront en intensité. Nous nous efforçons de déterminer les mesures que peuvent prendre les sociétés de distribution pour planifier en prévision de conditions météorologiques qui évoluent et empirent avec le temps.

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